Africana Plus  

No 75 Avril 2007.3



Environnement

Retrouver l'équilibre sacré!


Avant de parler d’environnement, la première chose à établir c’est la notion du temps. Il nous faut entrer dans le temps de Dieu, pour qui 1000 ans sont comme un jour. Dans cette perspective, il faut plutôt réaliser qu’à l’échelle de la planète et du cosmos, « court terme » signifie décennies et siècles. Le moyen terme devient donc quelques milliers d’années et le long terme se calcule en millions d’années. Dans notre lien avec l’environnement, c’est la même chose. Raser une forêt est beaucoup moins long que la remplacer, car il ne suffit pas de planter des arbres il faut aussi les laisser pousser pendant quelques décennies avent d’obtenir une nouvelle forêt mature.

Le deuxième aspect à garder bien en tête est que tout se tient. Comme nous le rappelle Paul, avec l’image du corps pour définir l’Église, on peut dire que la Terre est un seul corps et que tout ce qui l’habite constitue ses membres. La Terre est un écosystème. Selon Hubert Reeves, « Dans un écosystème, survivent les espèces qui établissent un rapport harmonieux avec leur environnement (…) qui établissent un bon rapport d’échange : donner et recevoir. ». Malheureusement, il semble que notre espèce ait tendance à ne pas toujours établir des rapports harmonieux avec ce qui l’entoure. Voilà pourquoi plusieurs écologistes ne prédisent pas tant la fin du monde ou la fin de la vie (car ils sont conscients que la vie est plus grande que l’être humain) mais plutôt la fin de l’humanité que ces prophètes modernes nous présentent comme la conséquence de notre comportement actuel.

Finalement, en troisième lieu, il ne faut jamais oublier que si nous faisons partie du problème, nous faisons aussi partie de la solution. Nous sommes à même de réagir quand nous le voulons. Le trou dans la couche d’ozone en est un bon exemple : il s’est stabilisé et a même rapetissé à la suite des efforts législatifs, scientifiques et industriels en ce domaine.

Un « voir » lucide

Regardons les choses de plus près. Sommes-nous conscients que 15% de la population consomment 80% des biens de la planète et que nous sommes une part très active de ce 15% ? Savons-nous que les Québécois, ce qui veut dire chacun de nous, sont parmi les plus grands consommateurs d’énergie et d’eau par habitant au monde ? Je vous le demande : « Est-ce que vous surconsommez un peu, beaucoup, passionnément ? »

Si un sondage était fait sur le sujet, la plupart des gens répondrait : « Un peu. Ceux qui consomment beaucoup, ce sont ceux qui achètent plus que moi et surtout ceux qui achètent plus cher que moi ». Toutefois, tous seront d’accord pour dire que nous vivons dans une société de surconsommation. Nous considérons comme des « petits plaisirs » bien des choses qui sont superflues. La définition de la surconsommation, d’après moi, pourrait ressembler à ceci : « Phénomène économique provoqué par le fait d’entrer dans un magasin afin d’y acheter un article précis et d’en ressortir avec deux, trois, voire même quatre items! »

Le lien avec l’environnement ? Voici un extrait d’un article du journal Le Devoir : « La quantité de déchets que les Québécois produisent chaque année est véritablement phénoménale : plus de 11 millions de tonnes, ce qui équivaut à 22 tonnes toutes les minutes, ou à une tonne et demie par personne! Qui plus est, cette quantité tend à augmenter d’année en année. »

De plus, nous nous sursurconsommons des produits suremballés! Non seulement payons-nous l’emballage dans le prix, mais nous payons en plus pour en disposer et la planète paie le gros prix de l’entreposage de produits non décomposables comme le styrofoam.

Pour ce qui est du réchauffement de la planète, c’est bien simple : depuis 1976, il est trois fois plus rapide que dans le siècle précédent! Présentement, l’activité humaine rejette dans l’atmosphère de très grandes quantités de CO2, de vapeurs d’eau et de méthane qui sont les principaux gaz à effet de serre. Grâce à nous, les neiges éternelles  se meurent et les glaciers du Pôle Nord ont déjà considérablement diminué. Ces derniers s’apprêtent d’ailleurs à libérer des tonnes et des tonnes de méthane dans l’atmosphère, un gaz à un effet de serre des plus efficaces. C’est ce qu’on appelle un effet « boule de neige fondante ».

Nous devons nous rappeler que « La misère et surtout la disparité des richesses (15% consomment 80%) représentent, avec le réchauffement de la planète, les plus grandes menaces pour l’avenir de l’humanité. »

Un « juger » chrétien

La Parole de Dieu nous aide à faire un « juger » ajusté à ces réalités. Des phrases comme « Le Père et moi nous sommes un » (Jn 10, 30); et « Ce que vous faites au plus petit d’entre les miens, c’est à moi que vous le faites » (Mt 25,40) nous démontrent que Jésus pressentait avec force l’ultime unité de tout ce qui semble divisé. Le grand classique chrétien en matière environnementale, François d’Assise, avait lui aussi intimement compris le lien qui l’unissait avec sa sœur la Terre. De même, plusieurs spiritualités prônent le respect de la vie sous toutes ses formes. Tout cela, nous le savons, mais, dans le concret, en sommes-nous convaincus ? Nous avons facilement l’impression que nous ne sommes pas responsables, que la pollution, par exemple, est le fait des industriels. « Ce n’est pas moi, c’est la faute du serpent. » Péché universel.

Comme individus, que pouvons-nous faire ? « Chaque dollar est un vote. » Voilà notre démocratie. Avec chacune des piastres que nous dépensons, nous encourageons une manière de faire. Les industriels nous donnent ce que nous achetons. Par exemple, ce que nous avons dans notre assiette présente un exemple universel et concret de notre lien avec l’environnement. Nous avons un effet direct sur la nature à chaque fois que nous préparons notre menu.

Le saviez-vous : Nos repas parcourent en moyenne environ 2500 km avant d’arriver sur notre table. Un camion de transport de 40 tonnes produit environ cinq tonnes de gaz à effet de serre par cargaison de nourriture. Dans un IGA moyen, ce sont deux camions (vans) par jour qui viennent livrer de la nourriture. Ce qui signifie : 730 cargaisons par année produisant 29 200 tonnes de gaz à effet de serre pour un seul supermarché. La surconsommation chronique et impulsive donne droit  à une drôle de statistique : 40 `50% de la nourriture va aux poubelles.

« L’agir », source d’espérance

Heureusement , de nouveaux Jonas se lèvent et nous invitent à nous convertir, à prendre conscience de notre responsabilité collective. Des groupes comme Équiterre, Eau Secours, Les amis de la Terre, ATTAC-Québec, Greenpeace. De même bien des gens de notre entourage qui font des efforts particuliers à la maison et au travail afin de moins gaspiller. C’est là une grande victoire!

Et que pouvons-nous faire concrètement ? Nous devons VOTER! Nous avons le pouvoir de changer les choses par le « pouvoir d’achat ». Il nous faut cesser de laisser aux autres et à la mode le soin de décider ce que nous ferons de ce pouvoir. Nous devons acheter consciemment et non plus impulsivement. Car l’achat des « petits plaisirs » libère une petite dose d’endorphine qui fait plaisir à tout notre corps. Lorsque nous refusons consciemment d’acheter le petit superflu, le corps en ressent presque un manque. Il faut accepter cette forme de sevrage si nous voulons enfin mettre en œuvre le premier des « 3R » : la réduction.

Les 3R – Réduction, Réutilisation et Récupération

Réduction : C’est le plus urgent des « 3R », actuellement. Faisons attention aux produits jetables : assiettes, verres de foam, cellulaires, essuie-tout, etc. car la quantité de déchets enfouis a beaucoup augmenté, tout simplement parce que nous surconsommons plus qu’il y a 10 ou 15 ans. Voilà pourquoi nous devons absolument réduire! Posons-nous la question : en avons-nous vraiment besoin ? Alors, réduisons!

Réutilisation : On dit que « environ 85% des choses qu’on jette seraient réutilisables. » Pensons-nous à réutiliser les sacs d’épicerie ? Réfléchissons et réutilisons!

Récupération : De grandes victoires sont à souligner dans ce domaine. Les Québécois ont principalement axé leurs efforts sur cet aspect et recyclent beaucoup plus qu’avant. Disons-nous bravo! Mais rappelons-nous que l’objectif fixé est d’en arriver à recycler 65% de notre sac de poubelles d’ici 2008. Aux dernières nouvelles, nous étions à 42%. Persévérons et récupérons.

Achats responsables

Quand nous achetons, vers quoi faut-il se tourner ? Tout d’abord vers les produits locaux. Chaque fois que nous choisissons un produit de chez nous, nous diminuons les gaz à effet de serre. Paierons-nous plus cher ? Oui, et avec enthousiasme! Il est temps de réaliser que nous payons présentement très cher toutes les fois où nous voulons économiser une piastre. Entre autres, les emplois perdus créent du chômage et de l’instabilité sociale.

Certains argumentent : « Si nous réduisons notre consommation, si nos entreprises deviennent écologiques et doivent payer pour recycler, tout le monde va fermer boutique ». Mais si nous écoutons les nouvelles régulièrement, nous constatons que nous n’avons pas besoin d’être écolo pour perdre des jobs! Toutes nos usines de textiles sont allées exploiter ailleurs; les grandes compagnies annoncent régulièrement des coupures de postes importantes et le gouvernement semble fier de créer des emplois précaires. Et… passez-moi l’expression : «  le capitalisme se tire lui-même dans le pied ». Il contient son propre programme d’autodestruction. Pas l’écologie.

Après l’achat local, il y a l’équitable. Un produit certifié équitable, comme certains cafés, par exemple, nous assurent que le cueilleur de café a reçu un juste prix pour son travail. C’est une forme de salaire minimum international ou de syndicalisation planétaire. Ajoutons à cela que, le plus souvent, des produits de table équitables sont biologiques. Chaque dollar est un vote.

Utilisons un sac à marché en tissu, du papier recyclé : c’est une façon de cesser de couper des arbres inutilement. Achetons des ampoules écologiques, qui durent cinq ans et qui dépensent beaucoup moins d’électricité. Choisissons des bottes d’hiver québécoises, pour ne pas perdre ce marché comme nous avons perdu celui des souliers et du textile.

Connaissez-vous le programme d’Agriculture Soutenue par la Communauté (ASC). Cette forme d’agriculture offre un véritable appui `la petite agriculture québécoise. En payant directement à l’agriculteur biologique en début de saison, nous l’assurons de notre appui et nous partageons avec lui les risques climatiques. Puis, à chaque semaine de l’été, nous recevrons une boite de fruits et légumes frais, sains et délicieux! Si nous sommes nombreux à voter pour ce genre d’agriculture, les agriculteurs suivront. Ils répondront à notre demande tout en arrêtant de s’empoisonner la vie à coup de pesticides et d’OGM (Organismes Génétiquement Modifiés).

Être co-créateur

S’intéresser à l’environnement, dans un esprit co-créateur, c’est d’abord faire un inventaire de mes besoins réels, puis me faire un budget, le respecter et être conscient que chacune des mes décisions commerciales a un impact direct sur le merveilleux écosystème terrien.

À tout instant, j’ai le choix d’être une vitamine ou un microbe dans le corps de Dieu, ce corps dans lequel cinq pains nourrissent 5000 personnes et non pas 5000 pains qui pourrissent dans les greniers de cinq personnes. Nous nous devons d’être un membre actif et dynamisant dans la société!

Et pour terminer, rendons grâce à Dieu d’avoir bien voulu nous déranger dans nos habitudes et nous serons fiers d’être ses fils et ses filles, des hommes et des femmes matures et plus responsables de la création qu’il nous a confiée !

 

Rémy Perras


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