Africana Plus  

No 83 Janvier 2009.1



Droits de l'homme

De belles sexagénaires



Imaginons que la Déclaration universelle des droits de l'homme vienne tout juste d'être rédigée. Imaginons qu'elle soit soumise aujourd'hui à l'Assemblée générale des Nations unies. Serait-elle adoptée? Probablement pas.

La Déclaration universelle des droits de l'homme a eu 60. Le 10 décembre 1948, le monde sortait tout juste de la Seconde Guerre mondiale. Bien des espoirs étaient permis. Pourtant... Combien de crimes de masse depuis cette époque? Combien d'hommes, de femmes, d'enfants exterminés parce qu'ils étaient ce qu'ils étaient? Le visage hideux de la haine, de la haine de l'autre, des autres, existe. Il est tellement humain...

Des représentants de dictateurs continuent de faire la pluie et le beau temps au Conseil des droits de l'homme de l'ONU. Les droits économiques et sociaux sont également bafoués. L'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture estime à 963 millions le nombre de personnes sous-alimentées dans le monde. Les potentats contemporains refuseraient d'adopter la Déclaration universelle des droits de l'homme aujourd'hui. Pas seulement les dictateurs, ce qui n'étonnerait personne, mais sans doute aussi plusieurs dirigeants très présentables, des dirigeants à la tête de régimes autoritaires. Cela, c'est sans compter les doutes de tous ceux qui, dans nos contrées, ont fait du «relativisme culturel» une doctrine humanitaire. Pour eux, ce texte est «occidental». Donc, condamnable. Il heurterait certaines cultures.

La meilleure réponse à offrir à ce discours caricatural est celle de Kofi Annan, l'ancien secrétaire général des Nations unies. Pour lui, «il n'est pas nécessaire d'expliquer ce que signifient les droits de l'homme à une mère asiatique ou à un père africain dont le fils ou la fille a été torturé ou assassiné». Sachant qu'elle pèse si peu, faudrait-il quand même aujourd'hui tenter d'inscrire cette déclaration au patrimoine de l'humanité? Oui. Il le faudrait parce qu'elle est un idéal. Elle montre une destination. Une destination qui ne sera probablement jamais atteinte, mais vers laquelle il convient d'aller. Elle est un point de repère. Un programme.

Même chose pour la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, également adoptée il y a 60 ans. Malgré l'incapacité de nos sociétés à secourir les peuples opprimés, malgré la crainte de plusieurs que ce devoir d'intervention soit une nouvelle forme d'impérialisme, cette convention montre une direction. La Déclaration et la Convention sont trop jeunes pour la retraite.

Jean-Marc Salvet, Le Soleil, 14 décembre 2008

Saint-Siège

Le respect des droits,

le fruit de la justice et la garantie pour la paix

Le respect des droits de l'homme est « le fruit de la justice » et une « garantie pour la paix », a déclaré mercredi à New York Mgr Celestino Migliore, Observateur permanent du Saint-Siège auprès des Nations-Unies.

Mgr Migliore est intervenu à la session commémorative de l'assemblée générale de l'ONU pour le 60ème anniversaire de la Déclaration universelle des Droits de l'Homme, soulignant que « les droits humains manifestent l'unité de la créature humaine, son aspiration à satisfaire ses besoins essentiels et à agir dans la jouissance de ses libertés, de ses relations, et selon ses valeurs spirituelles ».

Pour le représentant du Saint-Siège, la Déclaration est un « acte fondamental pour la vie internationale et pour la vie de chaque État » car, grâce à elle, « peuples, États, institutions internationales peuvent aujourd'hui encore redécouvrir le vrai sens de la personne, son humanité concrète, la dimension à un temps individuel et communautaire de ses droits, et en particulier la valeur réellement universelle de la dignité humaine ».

Son texte, a-t-il expliqué, montre en effet clairement que « les droits humains dont on demande l'application et la tutelle ne sont pas seulement l'expression d'une dimension de légalité » ; elles trouvent « leurs racines et leur finalité dans l'éthique et dans la raison naturelle commune à tous les hommes ».

« On peut le dire, par le biais de cette proclamation, la famille humaine tout entière affirme que le respect des droits est le fruit de la justice et une garantie pour la paix, a-t-il relevé. En disant protéger ces droits au niveau mondial, personnes, peuples, États et gouvernements manifestent leur volonté de surmonter les conflits et les contrastes pour parcourir ensemble un chemin unitaire fait de coopération et d'intégration ».

L'Observateur permanent du Saint-Siège a ensuite rappelé les paroles du discours prononcé, dans cette même salle, par Benoît XVI, qui « a lié les droits de l'homme et leur protection à deux objectifs fondamentaux : la promotion du bien commun et la sauvegarde de la liberté humaine ».

Concernant le premier aspect, Mgr Migliore a relevé que dans l'activité internationale et l'action de l'ONU en particulier, « l'idée du bien commun apparaît bien comme une condition essentielle pour prendre des décisions efficaces en matière de sécurité, de coopération et de développement, mais aussi au plan des actions à caractère humanitaire que l'organisation est de plus en plus appelée à mettre en œuvre pour faire face à des événements et situations qui compromettent gravement la personne, sa dignité et donc tous ses droits ».

La première violation des droits, en effet, « est le manque de conditions de vie considérées essentielles, quand prévaut une distribution inéquitable des richesses, un état de pauvreté, de faim, de manque de soins médicaux ».

Quant à la liberté humaine, a-t-il poursuivi « la protéger dans ses différentes dimensions et manifestations n'est pas seulement une garantie pour construire le bien commun et permettre que chaque personne ne soit plus atteinte dans sa dignité, mais c'est aussi reconnaître que 'tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et droits' (Art. 1) », « un fait qui permet de construire ces corrélations nécessaires entre les droits et les devoirs que possède chaque personne, chaque État, chaque communauté d'assumer la responsabilité des choix opérés, et de reconnaître son rapport de réciprocité avec les autres ».

Les droits humains, a-t-il ajouté, sont aussi « un moyen pour la personne de manifester son rapport à la vérité, de protéger sa conscience, sa dimension de foi et ses convictions plus profondes », « des aspirations que chacun doit être en mesure d'exprimer dans sa manière de faire partie d'une communauté de personnes, de citoyens, de croyants, tout en proposant sa propre vision de l'ordre social, des libertés, des institutions et des règles sans que cela devienne motif de discrimination ou de limitation dans sa participation au corps social ».

Dans ce contexte, a-t-il rappelé, la Déclaration universelle des Droits de l'homme prévoit aussi la liberté religieuse comme « une manifestation à la fois individuelle et communautaire » où « la dimension du citoyen et celle du croyant ne sont pas en opposition », où, bien au contraire, est reconnue « la pleine liberté du rapport entre la personne et son Créateur ».

« La Déclaration universelle a fait des droits humains et de l'action finalisée à leur défense, un des objectifs prioritaires de la communauté internationale et de la vie des États, faisant mûrir une expérience qui ne se réduise plus aux seules proclamations ou nécessités de modifier des législations et institutions de chaque pays », a relevé Mgr Migliore.

« En effet, les droits ne sont pas un rappel rhétorique, mais le résultat de gestes responsables de la part de chacun » ; des gestes « nécessaires dans un monde qui dispose de moyens adéquats, de structures spécialisées pour mettre fin au scandale de la faim et de la pauvreté, pour garantir une sécurité qui ne soit pas violée et bafouée, pour sauvegarder la vie à chaque instant ».

« Célébrer cette journée, a-t-il conclu, signifie mettre la personne au centre de la communauté internationale et de son droit, pour surmonter les obstacles présents sur le chemin de l'humanité ».

Isabelle Cousturié

(ZENIT, 11 décembre 2008)

 

 

 

 

 

Vatican

Aucun pays ne respecte pleinement les droits humains,

déplore le card. Martino

« Le non-respect nous pousse à promouvoir le respect »

« Aucun pays ne respecte pleinement les droits humains » définis par la Déclaration universelle de 1948 : cette affirmation du cardinal Martino a fait un titre de L'Osservatore Romano. Le cardinal Martino a dénoncé la situation des prisons dans le monde. Et il a affirmé : « le non-respect nous pousse à promouvoir le respect ».

Au cours de la conférence de presse de présentation des célébrations du 60e anniversaire de la Déclaration universelle de 1948, le cardinal Martino a déploré que les droits ne soient pas respectés, même « chez ceux qui promeuvent cette déclaration ».

Nulle part ces articles sont tous respectés, a ajouté le président de Justice et Paix qui citait ses voyages les plus récents - pour faire connaître le Compendium de l'enseignement social de l'Église catholique - en Corée, en Thaïlande, au Guatemala, au Brésil, en Tanzanie.

Il a notamment évoqué ses visites dans les prisons : « Lorsque je visite ces établissements, je touche du doigt le fait que pour nos frères détenus, la déclaration n'a jamais existé. Parce que le respect de la personne humaine, même sujette à une punition, est très, très, loin d'être une pratique des gouvernements ».

« Allez dans une prison où vous voyez six personnes dans un espace où seulement deux peuvent être debout et où les quatre autres doivent demeurer couchées sur des lits superposés :  c'est cela le respect de la personne humaine ? », a demandé le cardinal Martino tandis qu'une qualité de silence particulière s'installait dans la salle. Il a ajouté, toujours dans une atmosphère particulièrement grave et attentive: « Cette cellule n'est pas loin de chez nous. C'est seulement un exemple.

C'est pour cela que l'Église veut donner de l'importance au respect des Droits de l'homme. Le non-respect nous pousse à promouvoir le respect ».

 

Anita S. Bourdin

(ZENIT, 14 novembre  2008)


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