No 43 octobre 2001.1
2001
Année internationale du bénévolat
Une année d'écoulée, une année qui nous avait été donnée : qu'en avons-nous fait ? Nos parents nous disaient : le temps, c'est de l'argent, ne le perds pas. Non! Le temps, c'est beaucoup plus que de l'argent, c'est de l'éternel en voie de fabrication. Bonne et heureuse année! Lance-t-on un peu partout. Des souhaits qui se veulent toujours sincères et remplis d'espérance pour une Nouvelle Année. Que fera-t-on pour qu'ils se réalisent en l'an 2001? Plus que de belles paroles, ces souhaits devront se traduire en actions.
L'Assemblée Générale des Nations Unies, dans sa 52ème session du 20 Novembre 1997 (résolution 52/17), soutenue par 123 pays, a décidé de consacrer 2001, Année Internationale des Volontaires (AIV) ou Année du bénévolat. Dans un ouvrage intitulé "Le cur sur la Main" (des repères pour l'action des bénévoles), l'Office de la catéchèse du Québec (OCQ) définit le bénévolat comme "un mot composé du verbe vouloir (volere) et du mot bien (bene): les bénévoles font librement le bien.. parce qu'ils le veulent bien! Il évoque aussi les mots bien veuillant (on parlait ainsi il y a 500 ans) et benevolus (voulant le bien). Comme le mot l'indique, le bénévolat est donc un choix. Il se distingue des autres types d'actions par son caractère gratuit".
Pour en revenir à l'ONU, l'organisme nous explique que le service volontaire est un fait de pratiquement toutes les civilisations et de toutes les sociétés. Ses formes sont multiples, qu'il s'agisse de l'entraide traditionnelle voulue par la coutume ou l'action communautaire en temps de crise, ou d'être encore de la participation aux opérations de secours, à la résolution des conflits et aux programmes visant à l'élimination de la pauvreté. Ce concept inclut le volontariat local et national, ainsi que les programmes bilatéraux et internationaux qui uvrent au-delà des frontières. Développer l'action volontaire est plus nécessaire que jamais face à la dégradation de l'environnement, à l'abus des drogues illicites ou à la pandémie du sida qui affectent mondialement les secteurs les plus vulnérables de la société ; plus encore quand on considère la priorité que la communauté internationale entend donner à ces problèmes, avec une attention spéciale aux pays en développement en général et à l'éradication de la pauvreté en particulier.
Le premier objectif de l'AIV 2001 est d'accroître la reconnaissance de l'effort volontaire des individus et des groupes. Il doit être reconnu que la contribution des bénévoles a été et continue d'être déterminante pour le travail de la plupart des Agences du Système des Nations Unies dans des domaines comme l'alphabétisation, les vaccinations, la protection de l'environnement, la population, la nutrition, l'aide alimentaire etc. Il est essentiel de ne pas gâcher cette nouvelle année qui nous est accordée. Il n'y a pas que nos problèmes personnels qui ont de l'importance. Il y a aussi les grands problèmes planétaires. Il y a le terrible fossé entre les riches et les pauvres qui continue de grandir à l'échelon de la nation, comme à l'échelon de la planète; il y a les milliers de réfugiés, les millions de sidéens non soignés, etc.
Les spécialistes de la faim dans le monde savent parfaitement que dans les trente ans à venir, il faudra ajouter 3 milliards de couverts (200 millions par an) pour répondre aux besoins d'une population mondiale qui aura passé de 6 à 9 milliards d'individus. Beaucoup d'affamés se trouveront dans les pays du tiers monde, plus spécialement dans les pays du continent africain. Mais les spécialistes savent aussi que le défi peut être relevé, grâce aux progrès de l'agronomie et aux découvertes du génie génétique (Pensons à cette découverte extraordinaire que des chercheurs américains, européens et japonais ont réalisée dernièrement sur une modeste plante Arabidopsis thaliana : ils ont déchiffré pour la première fois la séquence complète du génome de cette plante. Cette grande première génétique permettra des avancées en matière d'alimentation et de médicaments). Le défi peut être aussi relevé grâce à une gestion plus harmonieuse des terres arables et des ressources en eau, grâce à l'introduction de variétés végétales et animales plus performantes. La production alimentaire va normalement croître plus vite que la population. Le défi peut enfin être relevé grâce à ces centaines de millions de bénévoles de par le monde qui vont oser défier les lois de la pauvreté par leur gratuité et leur générosité. L'Esprit est aussi à l'uvre pour soulever des élans de générosité, et des prodiges d'imagination.
Voilà pour le monde et les Nations Unies! Et pour le Canada ? L'intérêt des Canadiens ordinaires pour le développement international et leur contribution à ce chapitre au cours des dernières années tiennent au fait que le Canada fut l'un des premiers pays occidentaux à verser une aide financière directe aux organismes de développement bénévole sous forme de subventions correspondant au total des dons privés. Même si les agences de développement diffèrent beaucoup de par leur taille et leurs objectifs, la plupart sont nées d'une vive préoccupation pour le bien des peuples de la terre de nourrir les affamés, secourir les malades, aider les réfugiés et les autres personnes en détresse, assurer un enseignement de base, aider une collectivité à résoudre ses problèmes ou fournir des secours à la suite d'un désastre naturel ou d'une famine. Les agences de développement poursuivent en général l'un des buts suivants : répondre aux besoins des populations des pays pauvres, sensibiliser les Canadiens au développement international, obtenir leur aide à ce chapitre, et favoriser les politiques gouvernementales qui conduisent à l'établissement d'un ordre mondial juste et pacifique.
Le secteur du bénévolat et de la bienfaisance fait partie intégrante de l'infrastructure sociale du Canada. Selon les statistiques canadiennes des trois dernières années, le volontariat occupe plus de 7,5 millions de Canadiens. Il dispense des services bénévoles d'une valeur de 13 milliards de dollars aux Canadiens. S'il fallait payer ces services, les salaires de ce secteur seraient supérieurs à ceux de plusieurs secteurs économiques du Canada, dont ceux du pétrole, de la forêt et des mines. Ces millions de bénévoles fournissent un milliard d'heures par année sous forme de services; cela équivaut à 750 000 travailleurs à temps plein, soit l'équivalent de la population active totale du Nouveau-Brunswick et de la Saskatchewan ou de 5 p. 100 de tous les emplois au Canada.
Selon le rapport à la direction du Soutien aux organismes volontaires Multiculturalisme et Citoyenneté Canada (Centre d'action bénévole Ottawa-Carleton 1992), il ressort que la formule de la réussite, en matière de bénévolat, pourrait se formuler à peu près comme suit : fournissez aux bénévoles des occasions de se réaliser, permettez-leur de découvrir des facettes cachées de leur personnalité et de celle des autres et donnez-leur le sentiment qu'ils créent des liens de solidarité avec leur communauté et lui apportent une contribution. Ajoutez à ces conditions la formation, le soutien et la reconnaissance qui s'imposent, et vous aurez des bénévoles débordants d'énergie, qui s'amusent en travaillant et qui se sentent mieux qu'avant de faire du bénévolat.
Si le monde va mal, il faut trouver des personnes qui auront le courage de changer le monde. Qui osera sengager dans une lutte qui semble, à prime abord, tellement inégale? Plus que jamais nous avons besoin de gens qui s'engagent gratuitement. Le père Lebret, un dominicain français, disait que ce monde a besoin de fous. Des fous qui sengagent à fond, qui oublient, qui aiment autrement quen paroles, qui se donnent pour de vrai et jusquau bout. Il nous faut des fous, des déraisonnables, des passionnés capables de sauter dans linsécurité et dans linconnu toujours plus béant de la pauvreté. Il nous faut des fous du présent, épris de vie simple, amants de la paix, purs de compromission, décidés à ne jamais trahir, méprisant leur propre vie, capables daccepter nimporte quelle tâche, de partir nimporte où: à la fois libres et obéissants, spontanés et tenaces, doux et forts. Ces fous, ce sont les gens qui osent se salir les mains, qui prennent le risque du monde, du tiers monde et du quart monde. Un peu comme le levain dans la pâte. Être la pâte, ce nest pas compliqué: il suffit de se laisser pétrir par lévénement. Être le levain, ce nest pas compliqué non plus: il ny a quà se tenir à labri du mal en évitant la contagion. Mais, privée de levain, la pâte demeure plate tandis que le levain, hors de la pâte, reste stérile et dépérit. Être levain dans la pâte, cest oser entrer dans la pâte du monde pour y apporter un ferment qui puisse la faire lever. Et ce ferment sera toujours la vérité, la justice et lamour.
Et nous, que pouvons-nous faire en cette nouvelle année pour que notre monde devienne un monde meilleur ? Les exemples ne manquent pas :
- Nous avons une maison confortable, laissons la porte ouverte aux amis de nos enfants qui n'attendent qu'une oreille attentive. Partageons notre confort.
- Nous avons une bonne retraite et nous cherchons encore un autre emploi! Ne cumulons pas. Si nous voulons vraiment de l'action, le bénévolat nous attend. Partageons notre travail.
- Nous avons un bon salaire. Ne ronchonnons pas si nous ne sommes augmentés que de 0.25$ alors que ceux et celles qui ont un petit salaire l'ont été d'un dollar. Partageons notre avoir.
- Nous sommes à la retraite et nous avons acquis avec le temps beaucoup de connaissances. Partageons notre savoir dans un organisme de réinsertion des chômeurs. Partageons notre temps.
- Nous avons pris des vacances dans le sud depuis des années. Nous connaissons peut être les besoins du tiers monde. Partageons notre argent avec des Organismes de développement international ou des Communautés missionnaires. Partageons notre argent.
- Nous avons un foyer chaleureux. Nous sommes riches d'amour de la part de notre conjoint et de nos enfants. Faisons donc un petit tour dans une prison rencontrer ceux et celles qui ne savent plus la douceur d'un regard ami. Partageons notre amour.
- Nous sommes riches de nos convictions, qui nous comblent d'espérance. Partageons aussi notre foi.
- Nous sommes pauvres, et nous pensons que nous n'avons rien à partager, mais nous avons notre sourire. Partageons notre sourire.
Et que ce partage soit sans calcul. Qu'il soit bénévole, c'est-à-dire un bien qui se veut gratuité.
Michel Fortin, M.Afr.